mardi 25 février 2014

Fiv Icsi 1

Nous voilà donc au pied de ce premier mur. Nous sommes inquiets, mais confiants et tellement contents d'avancer.
Cette fiv a lieu sur mon 24e cycle depuis que je les suis à la trace. Eh oui, j'ai commencé mes courbes de température en juin 2011 (et cela faisait déjà plusieurs mois que nous nous employions à fabriquer un bébé).
Je suis un protocole court avec Ménopur de J2 à J11 et Orgalutran de J6 à J12. J'ai décidé d'apprendre à me faire les piqûres moi-même pour être plus autonome et ça va. Je suis allée voir une infirmière les deux premiers soirs pour qu'elle me montre et m'apprenne. Puis, j'ai pris la seringue à deux mains, non une seule parce qu'avec l'autre il faut se pincer le bide, et je m'en suis bien sortie, quelques bleus mais pas trop.
Le monitorage est satisfaisant, tout se déroule bien. Enfin presque. Monhomme a décidé de venir avec moi au premier rendez-vous, question d'être ensemble, de voir ce qu'il se passe dans le bureau de madame Echo, de voir qui je vais devoir voir, à qui je vais devoir montrer tout mon intérieur (finalement, il n'a pas vu grand-chose, il a surtout été un peu tétanisé par l'outil...). La secrétaire de madame Echo m'avait dit de venir avec mon ordonnance. Oui, mais madame Echo, elle, ce qu'elle veut, c'est toutes les ordonnances avec tous les produits divers et variés. Evidemment, au premier rendez-vous, je ne les avais pas. Elle est très pro madame Echo, mais elle parle avec un petit accent que j'ai un peu de mal à comprendre lors de cette première rencontre ce qui fait que je ne comprends pas tout ce qu'elle me dit tout de suite, et surtout, elle me sermonne sèchement au sujet de ces ordonnances que je n'ai pas. Là, il a failli y avoir un incident diplomatique. Moi, je me sens comme une petite fille qui n'aurait pas fait ses devoirs (ben oui, mais on m'a pas clairement dit que j'avais aussi cet exercice à faire) et je vois Monhomme qui prend un visage tout fermé et dur. Là, heureusement, madame Echo s'arrête et passe à autre chose. Une fois dehors, Monhomme fulmine. Il m'explique que vraiment, si elle avait un peu insisté, il lui aurait expliqué que si personne ne nous dit clairement ce qu'il faut amener, on ne peut pas le deviner. Qu'a priori, je suis hyper organisée et que donc, si je n'ai pas un document, c'est juste qu'on ne m'a pas dit qu'il fallait l'avoir! Bref, un peu plus il la mordait madame Echo...

Les rendez-vous s'enchaînent et m'épuisent. J'ai essentiellement cours en matinée et j'arrive donc à gérer les rendez-vous en parallèle du boulot sans débordement :
  • lever vers 5h30 tous les deux jours
  • départ à 6h30 pour être vers 7h au labo de l'autre côté de GrandeVille pour la prise de sang
  • puis je retraverse GrandVille pour être au boulot à 8h30 quand c'est le cas
  • dans l'après-midi je retraverse GrandVille pour être au cabinet de madame Echo
  • et je retraverse une dernière fois pour rentrer à la maison...
Epuisant. Evidemment, c'est là qu'on te dit: "Surtout reposez-vous bien hein". Ben voyons!!!

J'ai 7 beaux follicules de chaque côté. La piqûre d'Ovitrelle est programmée et c'est parti pour la ponction. Madame Echo me souhaite bonne chance. Elle n'est donc pas si désincarnée que ça (d'ailleurs elle n'a jamais plus eu ce ton dur de la première fois).
Monhomme est complètement affolé par ces piqûres, par la fatigue liée au traitement et au parcours du combattant que je mène tous les deux jours, par l'opération à venir et l'anesthésie générale qui va avec et par la nécessité pour lui de fournir une bonne prestation ce jour-là.

Là, il y a eu un moment rock-and-roll encore: j'ai une vieille voisine qui s'occupe de mademoiselle LeChat quand nous sommes absents et avec qui je discute souvent car elle est malade et ne peut pas sortir de son appartement. Elle sait que nous sommes en Pma et m'a tout de suite expliqué que son fils est justement biologiste dans un service Pma d'un grand hôpital. Elle m'a tout de suite dit que si j'avais des questions, je pouvais demander son téléphone. Et accessoirement, c'est une vieille dame très croyante et depuis elle m'a dit que tous les matins elle priait pour nous. Ça m'a touché. Parce que c'est ce que ma grand-mère adorée aurait fait, mais qu'elle n'est plus là pour le faire. Bref, donc son fils est biologiste. Et nous voilà avec la perspective de la ponction puis du transfert et on réalise que nous n'avons pas discuté de cela avec GrandGygy. Combien d'embryons faut-il transférer? Combien compte-t-il transférer? Quels sont les risques? Quels sont les "avantages"? Y a-t-il des études à ce sujet? Si on doit donner notre avis, qu'en pensons-nous? Là, on réalise qu'on met tellement un pied devant l'autre qu'on n'a pas posé toutes ces questions. On cherche sur G**gle. Et puis le dimanche qui précède la ponction, voilà qu'il y a du bruit sur notre palier. Le fils de notre voisine est là, en train d'essayer d'ouvrir la porte de sa mère et sans y arriver. Je sors, demande ce qu'il se passe. Sa mère est tombée dans sa salle de bains la veille et elle est par terre depuis. Mais ses clés sont dans la porte et le fils ne peut entrer. Me voilà en pyjama, apportant l'aide que je peux (un tournevis, une pince à épiler, lesquels auront heureusement raison des clés laissées dans la porte) et me disant que justement, c'est à lui qu'on devrait poser nos questions, mais que ce n'est vraiment pas le moment. On ne le fera pas, le laissant appeler les pompiers et emmener sa mère à l'hôpital. Heureusement, car pendant la convalescence de la vieille dame, je suis souvent aller la visiter et un jour je lui ai raconté ça. C'est là que j'ai appris que ce n'était pas son fils le biologiste, mais son gendre... Non seulement ce n'était pas le moment, mais en plus ce n'était pas la bonne personne.

Bref, la ponction. Anesthésie sans problème. Lorsque je me réveille, GrandGygy vient me parler en salle de réveil pour me dire que tout s'est bien déroulé, qu'il a ponctionné 19 ovocytes, que c'est très bien. Là je réalise, du fond de mon nuage de réveil, qu'il me dit un truc important, un truc dont je dois me souvenir pour le dire à Monhomme quand je serai de retour dans la chambre. Je me concentre... autant que possible. Maintenant je sais qu'en fait, on revient nous dire ça dans la chambre. L'infirmière de la salle de réveil vient plaisanter : "Waouh, vous avez de quoi faire une équipe de foot!!!". Ça me fait rire. Je le répèterai à Monhomme qui voudra juste savoir si elle peut être mixte, l'équipe :-) De son côté, tout s'est bien passé aussi.
19 ovocytes, je réalise que je ne sais même pas les normes, si toutefois norme il y a. GrandGygy m'a dit que c'était très bien, mais que faut-il en penser? Je saurai assez vite que, s'ils sont de bonne qualité, c'est vraiment bien.
Me voilà avec un arrêt d'une semaine. Retour à la clinique prévu 2 jours après pour un transfert.
Monhomme a une réunion importante l'après-midi. Comme je me sens très bien (l'erreur de débutante!!! allez, Wonderwoman, plus forte que tout le monde hein!!!) je lui propose de me laisser simplement à l'entrée du métro et de filer à son boulot puisque, bien que nous habitions tout à fait à l'autre bout de GrandeVille, c'est notre ligne directe qui est là. J'insiste, je me sens bien. Me voilà donc dans le métro. Oui, mais au bout de 10 mn je sens que ça ne va plus. Plus les stations passent, plus je me demande si je vais même seulement être capable de me lever pour descendre... Bon, je ne recommencerai plus jamais ça.

Une fois chez moi et remise de mes émotions, je vais bien, très fatiguée, mais sans vraiment de douleur. J'évite tout effort, je me repose. Nous sommes pleins d'espoir. Pleins d'angoisse aussi car nous attendons le coup de fil du lendemain qui doit nous dire combien d'ovocytes ont pu être micro-injectés et combien ont été fécondés.
Le téléphone sonne: donc sur  19 ovocytes prélevés, 18 ont été micro-injectés (waouw), 9 ont été fécondés (rewaouw, c'est vraiment bien ça!)
Tout cela donne 9 embryons. Nous voilà donc prêts pour le transfert, en nous disant que si on peut, nous on préfèrerait en avoir 2 directement. Ça tombe bien, c'est ce que propose GrandGygy. Les embryons sont beaux. Les autres sont laissés en culture pour voir s'ils peuvent les congeler. Bilan : 3 embryons congelés : 2 à J3 et un à J5. Super.
On est confiants. On est à fond. On parle aux embryons.

Puis arrive la première prise de sang. Négative. Et là, tout s'effondre. D'un coup.

On le prend en pleine g***le. On réalise qu'on avait pensé, quelque part, que la nature n'était pas notre amie d'accord, mais que là, maintenant, tout était dans les mains des médecins et que donc, forcément, ça allait marcher. Oui, on savait, on avait lu, entendu dans la bouche des médecins, que ça ne marchait pas forcément à tous les coups, pas du premier coup. Mais on avait tout de même, tous les deux (et ma famille aussi d'ailleurs) pensé que ça allait forcément marcher. C'est une grosse claque. On tombe de haut.
Nos familles sont bien au courant de nos difficultés, de notre parcours, mais nous n'avons pas souhaité leur donner la date exacte des résultats. Nous sommes restés un peu évasifs. Pour nous préserver. Quelle que soit la réponse.
Mais ma soeur m'appelle cet après-midi là, un après-midi où je suis chez moi habituellement, parce qu'elle a une question à me poser sur l'été à venir. Je tâche de répondre. Mais elle entend que ma voix est blanche. Elle me demande si tout va bien et je m'effondre. Je lui donne le résultat. Elle est sonnée. Au fond, elle avait pensé tout comme nous. Je sanglote. Elle cherche quoi me dire. Désespérément. Et elle me dit quelque chose qui est juste, qu'elle voudrait rassurant, mais qui ne me va pas du tout: "Tu sais, ça ne peut pas marcher dès la première fois".
Elle a raison bien sûr mais sur le coup, je lui réponds que c'est vrai, mais que là, en fait, pour nous, ce n'est pas du tout la 1re fois, c'est au moins la 24e fois. La 24e fois où je note tout ce que dit mon corps - et je passe au moins 12 autres fois avant que je m'observe chaque jour, ce qui nous emmènerait à la 36e fois depuis qu'on a commencé nos essais. Je lui rappelle combien elle était exaspérée d'attendre son second enfant alors que son attente à elle a duré au grand maximum 6 mois, 6 ou 7 malheureux cycles donc. Nous, on en est à la 36e fois tu vois. 36 espoirs, 36 échecs. Je lui dis tout ça entrecoupé de gros sanglots. Elle est toute désolée de ce qui nous arrive, ne sait plus quoi dire.  Le lendemain, elle me rappelle pour prendre des nouvelles, commence par s'excuser de n'avoir pas trouvé les bons mots. Me dit qu'elle y croyait tellement pour nous qu'elle en a été toute surprise et n'avait pas du tout prévu que ça puisse être négatif. Je lui explique que ce n'est pas grave, qu'elle a dit ce qu'elle pouvait, qu'il n'y a au fond rien à dire dans ces cas-là et que de toute façon aucune parole ne pouvait vraiment être un secours pour nous dans ces circonstances. Le monde entier nous semblait simplement injuste tout à coup et personne n'y pouvait rien.
La 2e prise de sang confirme. Je passe chez mes parents, pour leur annoncer le résultat de vive voix. Je pleure. Ils sont bouleversés. Trouvent juste les quelques mots qu'il faut pour me dire combien ils sont à nos côtés.
L'après-midi, j'appelle GrandGygy. Il est désolé et nous propose de repartir directement sur un TEC puisque mes règles ne sont pas encore arrivées. Il pratique les TEC sur cycle presque naturel, c'est donc possible d'enchaîner sans épuiser mon corps. Je suis contente de cette proposition, Monhomme suit à fond. GrandGygy termine la conversation en nous souhaitant "Bon courage". C'est gentil, vraiment. Je pourrai constater à chaque échec, à chaque mauvaise nouvelle, à chaque consultation difficile, que ce seront toujours ses derniers mots. C'est bien. Ça me va. Il est vraiment humain GrandGygy.


2 commentaires:

  1. Ton post m'a beaucoup émue. Pour toi, pour vous, mais aussi parce que ça me projette vers ma fiv 1. Et que j'y pense souvent, au premier échec. Les Pmettes, on le perd deux fois, l'espoir naïf. D'abord l'espoir du bébé couette. Puis l'espoir du bébé c1 du parcours PMA...

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    1. Merci Milie Mini. Je suppose oui que toutes les Pmettes traversent exactement ce moment-là, celui où le monde s'écroule... Ce sentiment d'injustice terrible reste un souvenir brutal.

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